Derrière la promesse d’un emploi flexible et lucratif, une machination huilée piège des milliers de victimes en exploitant la crédibilité d’un géant américain de la grande distribution. Une fraude qui pourrait rapidement s’amplifier dans nos pays.
Target Corporation, mastodonte du commerce de détail aux États-Unis, est aujourd’hui au cœur d’une escroquerie de grande ampleur. Des fraudeurs utilisent son image pour proposer de faux emplois à distance, attirant les internautes par des annonces alléchantes sur les réseaux sociaux. Derrière ces promesses, un système rodé mêlant crypto-monnaies, manipulation psychologique et usurpation d’identité. L’arnaque cible aussi bien les économies que les données personnelles. Cet article décrypte le fonctionnement de cette fraude numérique, en retrace le scénario et donne les clés pour ne pas tomber dans le piège. La fraude pourrait débarquer dans nos pays rapidement.
Quand le nom de Target devient une arme numérique
Target Corporation est loin d’être une inconnue. Fondée en 1902, l’entreprise emploie plus de 400 000 personnes et possède plus de 1 900 magasins à travers les États-Unis. Avec un chiffre d’affaires annuel dépassant les 100 milliards de dollars (soit plus de 92 milliards d’euros), elle incarne pour beaucoup une référence solide et fiable dans le paysage économique américain.
C’est justement cette réputation irréprochable qui fait de Target une couverture idéale pour les cybercriminels. Depuis plusieurs mois, un site nommé targetsubs[.]com se fait passer pour une extension officielle de la marque, proposant des emplois à distance « part-time » à des milliers d’internautes en quête d’un revenu complémentaire. Mais derrière ce design professionnel se cache une stratégie d’escroquerie parfaitement rodée.
Le site promet des missions simples : rédiger des avis, accomplir des micro-tâches, générer du trafic pour des commerçants… et être payé quotidiennement. Une routine accessible, à forte rentabilité. En réalité, Targetsubs n’a aucun lien avec Target Corporation. Le domaine a été récemment enregistré, les informations WHOIS sont dissimulées, et Scamadviser lui attribue un indice de fiabilité extrêmement bas. Aucun contact vérifiable, aucun lien juridique, et surtout un mode de paiement exclusivement en crypto-monnaie, qui rend tout remboursement impossible.
Le piège psychologique derrière la promesse d’un emploi
Le témoignage d’un habitant de l’Arizona illustre la mécanique implacable de cette fraude. Tout commence sur Facebook. L’homme, attiré par une annonce d’emploi à domicile, entre en contact avec « Nena », soi-disant responsable RH chez Target. La discussion bascule rapidement sur WhatsApp, où une certaine « Roxana » prend le relais. Mère célibataire, divorcée, elle raconte comment ce travail a changé sa vie. Son récit émeut, rassure, et convainc.
Le processus d’enrôlement est fluide : création de compte sur le site, intégration dans un groupe WhatsApp regroupant plus de vingt « collègues ». Chaque jour, des messages de motivation, des captures d’écran d’« économies » virtuelles, des félicitations entre collègues renforcent le sentiment d’appartenance. L’illusion est totale. Le premier jour, les tâches s’enchaînent. Pour deux heures de travail, un solde de 138 dollars (environ 127 euros) est crédité sur son compte et peut être retiré. Une phase d’amorçage, conçue pour inspirer confiance.
Puis viennent les fameuses « tâches packagées ». Le principe : payer d’avance pour une mission spéciale, plus rentable. Un premier dépôt de 65 dollars (60 euros), suivi de 350 dollars (322 euros), puis 890 dollars (818 euros), jusqu’à une ultime demande de 8 000 dollars (7 350 euros). La victime, prise dans l’engrenage, cède jusqu’à atteindre 3 600 dollars de pertes (3 305 euros). À la moindre hésitation, Roxana répète qu’il s’agit d’une « opportunité unique », que « ceux qui réussissent sont ceux qui osent ». Et quand l’homme refuse de verser les 8 000 dollars, son compte se bloque, les fonds disparaissent, les interlocuteurs s’évanouissent.
L’escroquerie repose sur un modèle psychologique bien établi : gains initiaux crédibles, interactions sociales valorisantes, promesses de revenus exceptionnels, et pression émotionnelle intense. Chaque phase est conçue pour désarmer les doutes, accélérer les décisions, pousser à payer encore.
Cyber-usurpation, crypto et exploitation émotionnelle : la triple menace
Cette fraude dépasse la simple tromperie commerciale. Elle constitue un cas d’école en matière de cybercriminalité. Le nom de Target est ici détourné pour assurer la légitimité de l’offre. Les escrocs utilisent ensuite la messagerie privée, ici WhatsApp, pour établir un lien direct, personnalisé, émotionnel. La création d’un groupe communautaire avec des « employés fictifs » renforce la confiance, l’idée d’être bien entouré. Le tout culmine avec l’usage des crypto-monnaies, rendant les transactions irréversibles et intraçables.
Ce cocktail de manipulation, d’anonymat technologique et d’usurpation d’identité fait de cette arnaque une menace de grande ampleur. D’autant plus qu’au-delà des pertes financières, certaines victimes confient avoir transmis leurs documents d’identité, à la demande de Roxana, pour soi-disant « valider leur compte ». Ces données peuvent être revendues sur le darknet ou utilisées pour ouvrir des lignes de crédit, contracter des prêts, ou commettre d’autres fraudes. Le préjudice devient alors durable, parfois irréversible.
Target Corporation a publié plusieurs avertissements officiels. L’entreprise rappelle qu’elle ne recrute jamais via des groupes privés, ne demande aucun paiement, et n’a aucun lien avec des sites externes comme targetsubs. Elle encourage les utilisateurs à signaler toute offre suspecte et à se référer uniquement à ses canaux officiels pour les opportunités d’emploi. Attention, ZATAZ a remarqué une version française de TargetSubs (ainsi qu’Italiene, Allemande et Espagnole)
Comment réagir et éviter le piège
Face à cette forme de cyber-escroquerie polymorphe, la prudence reste l’arme la plus efficace. Premier réflexe : méfiance systématique envers les offres d’emploi reçues via les réseaux sociaux ou des messageries instantanées. Si une proposition semble trop belle pour être vraie, elle l’est probablement.
Ne jamais envoyer d’argent, même pour un montant modeste. Ne jamais fournir de documents personnels à un recruteur inconnu. En cas de doute, il est essentiel de vérifier l’existence de l’entreprise via ses canaux officiels. Les victimes peuvent déposer plainte auprès de services spécialisés de la police ou de la gendarmerie nationale. Dernier point important que ZATAZ vous conseille : conserver toutes les preuves : captures d’écran, conversations, adresses web, identifiants de portefeuilles numériques. Ces éléments sont précieux pour les enquêtes et permettent aussi d’avertir d’autres internautes. Car si l’arnaque est numérique, ses conséquences sont bien réelles.