Un réseau de cybercriminels utilisant des dispositifs de masse pour diffuser des messages frauduleux a été démantelé en Russie, révélant l’ampleur d’un marché parallèle où les cartes SIM deviennent des armes numériques dans une guerre informationnelle de plus en plus sournoise.
Dans un monde où la cyberfraude gagne en sophistication, les autorités russes viennent de porter un coup significatif à une organisation criminelle spécialisée dans la fourniture massive de cartes SIM à des escrocs. Ce démantèlement dévoile les rouages d’un système qui s’appuie sur des technologies courantes, détournées à des fins malveillantes. En Russie, ces dispositifs sont devenus des outils centraux dans l’arsenal des fraudeurs, capables de tromper des milliers de victimes en quelques clics.
Mais derrière cette affaire à première vue purement criminelle se cache une réalité plus vaste et plus stratégique : une véritable guerre de la carte SIM entre la Russie et l’Ukraine. Depuis le début de l’invasion russe en février 2022, les deux pays se livrent une guerre hybride où l’information, la désinformation et les campagnes d’influence jouent un rôle aussi central que les armes conventionnelles. Et dans cette bataille silencieuse, les cartes SIM et les dispositifs GSM sont devenus des instruments de guerre.
En Ukraine, les autorités ont elles aussi multiplié les actions pour démanteler des réseaux utilisant ces technologies à des fins de fraude ou de propagande. Les boîtes SIM, souvent dissimulées dans des objets du quotidien, servent à diffuser en masse des messages de désinformation, des fausses alertes ou des contenus visant à semer la panique parmi les populations civiles ou à déstabiliser l’opinion publique. Ces outils permettent aussi de contourner les systèmes de filtrage de contenu, rendant leur traçabilité extrêmement complexe.
L’enquête russe, menée par le Comité d’enquête fédéral, a révélé l’existence d’un groupe structuré, piloté depuis l’étranger par un citoyen russe né en 1993. Bien que ce dernier n’ait pas encore pu être arrêté, car il réside actuellement aux Émirats arabes unis, les forces de l’ordre ont réussi à interpeller dix de ses complices présumés sur le territoire russe. Ils sont désormais poursuivis pour création et participation à une association criminelle, fausse déclaration en lien avec des actes de terrorisme, et fraude.
« La boîte se trahit par le bruit, la chaleur et l’abondance de ses fils », précise une note interne du ministère de l’Intérieur russe.
Les perquisitions ont permis de saisir des milliers de cartes SIM ainsi que des dizaines de boîtes SIM — des dispositifs électroniques capables de gérer simultanément des centaines de cartes téléphoniques. En les connectant à des réseaux GSM, ils permettent d’envoyer des messages automatisés à très grande échelle. En Russie, comme en Ukraine, ces technologies sont au cœur de stratégies numériques offensives. Elles facilitent aussi bien l’escroquerie de particuliers que les campagnes de guerre psychologique.
Dans les régions frontalières de l’Ukraine, les autorités russes ont intensifié les contrôles. Une instruction a été transmise aux unités locales de police, leur demandant d’inspecter de près les véhicules et les colis transportés par des coursiers. Les dispositifs, souvent camouflés dans des sacs isothermes ou des boîtes à outils, sont repérables à certains indices : une légère surchauffe, un bruit de fond électrique ou encore une profusion de câbles.
Les cartes SIM sont devenues des munitions numériques dans une guerre où l’information est l’arme principale.
Ce conflit numérique prend souvent des formes insidieuses. En Ukraine, des boîtes SIM ont été utilisées pour envoyer des messages alarmants sur des soi-disant attaques chimiques, des ordres de mobilisation falsifiés ou de fausses alertes aériennes. Ces campagnes de désinformation visent à perturber les chaînes de commandement, à semer la panique ou à éroder la confiance dans les institutions. En réponse, Kiev a elle aussi renforcé ses unités de cybersécurité et procédé à des opérations ciblées contre les relais de ces communications hostiles.
Du côté russe, l’utilisation frauduleuse de cartes SIM se double d’un enjeu économique. Ces cartes, souvent obtenues par des moyens détournés, sont revendues sur le marché noir, parfois à plusieurs dizaines d’euros pièce. Elles permettent aux escrocs de se doter d’identifiants multiples et temporaires, contournant ainsi les blocages et les outils de traçage mis en place par les opérateurs. Chaque carte devient une porte d’entrée pour diffuser des codes frauduleux ou des contenus de propagande.
Le Comité d’enquête russe souligne que certaines boîtes étaient capables de gérer jusqu’à 256 cartes SIM simultanément, permettant d’envoyer plusieurs milliers de messages par heure. De tels dispositifs, interdits sans licence, restent pourtant accessibles sur des marchés parallèles, souvent dissimulés sous des motifs légitimes comme les tests de réseaux ou les campagnes marketing.
La Russie n’est pas le seul pays confronté à ce défi. En Ukraine, des mesures similaires ont été prises pour interdire les passerelles GSM illégales. Des descentes de police ont été menées, notamment dans les grandes villes de l’est du pays, pour neutraliser des centres de transmission non autorisés. Ces opérations s’inscrivent dans une logique de guerre de l’information, où chaque message envoyé peut avoir un impact stratégique.
Ce bras de fer entre Moscou et Kiev sur le terrain de la télécommunication clandestine illustre une tendance globale : la militarisation croissante des outils numériques du quotidien. Les cartes SIM, initialement conçues pour faciliter les échanges et l’interconnexion, sont aujourd’hui détournées pour servir des objectifs bien plus sombres.
Espérons maintenant que les deux pays soient à l’écoute de la Paix, en ce moment, en Turquie.
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