
Classés en fonction de leurs chiffres d’affaires, les 500 premiers plasturgistes installés dans l’hexagone ont connu une croissance de 5,1 % en 2024. Entre dégradation globale de la conjoncture, fermetures de vapocraqueurs et chute des capacités de recyclage en Europe, le bilan de l’exercice 2025 s’annonce cependant plus tendu.
Quelques 31,4 milliards d’euros. C’est dans un contexte économique qui était déjà bien morose le chiffre d’affaires cumulé des 500 premiers transformateurs hexagonaux de plastiques en 2024. Avec un effectif total de 105 500 salariés, ces 500 établissements installés en France figurant dans le classement annuel de Polymères & Matériaux présentent en moyenne une marge opérationnelle de 5,1 % et un retour sur investissement de 6,3 %.
Ce classement 2024 consultable en intégralité dans les pages de votre magazine papier ou votre e-magazine disponible ici est réalisé par le cabinet spécialisé AS Études. Il repose en grande partie sur les chiffres déposés par les entreprises auprès des tribunaux de commerce. Et s’intéresse, donc, uniquement aux 500 premiers transformateurs du pays en termes de chiffre d’affaires. Le syndicat Polyvia présentera le 15 janvier 2026 son panorama économique de la filière pour l’année écoulée. Début 2025, celui-ci rappelait que, troisième sur le podium européen après l’Allemagne et l’Italie, la plasturgie française comptait au total près de 13 2000 salariés en 2023 et a représenté cette année-là près de 39,6 milliards d’euros de CA. Un chiffre qui atteignait près de 76 milliards d’euros (2,6 % du PIB national) et 211 000 emplois, en y ajoutant les métiers de recycleurs, fabricants de compounds et distributeurs de matière.
“La filière a bien résisté au premier semestre 2025. Les acteurs industriels ont tendance à être prudents face au contexte national, européen et mondial que nous connaissons. Qui plus est, la force des plasturgistes est de travailler pour des secteurs souvent très diversifiés”, explique le président de Polyvia, Pierre-Jean Leduc. Le dirigeant reste cependant, lui aussi, prudent quant aux résultats de la fin 2025, même si le “PIB français a plutôt bien résisté”.
Une conjoncture qui se dégrade rapidement
En novembre, lors de la visite de Roland Lescure dans l’Ain pour lancer l’édition 2025 du sommet Choose France, Bénédicte Durand Deloche, présidente de Polyvia Auvergne-Rhône-Alpes et PDG d’Altheora a cependant attiré l’attention du ministre de l’Économie sur “une conjoncture qui se dégrade rapidement et inquiète fortement” les adhérents du syndicat professionnel et la “menace réelle sur les capacités européennes de recyclage” de plastique. “Près d’un million de tonnes pourraient disparaître d’ici à fin 2025, compromettant nos ambitions en matière d’économie circulaire et de lutte contre le changement climatique”, a alerté la cheffe d’entreprise. “Les données préliminaires pour 2025 indiquent une augmentation de 50 % des fermetures d’installations de recyclage, entraînant la perte de près d’un million de tonnes de capacité de recyclage européenne en seulement trois ans”, prévenait ainsi le 12 novembre Plastics Recyclers Europe, l’association représentant l’industrie européenne du recyclage des plastiques. En cause : des coûts de production et d’énergie élevés, une baisse de la demande et l’augmentation des volumes d’importations non réglementées et à bas prix provenant principalement de Chine.
“La filière du recyclage souffre énormément. On trouve aujourd’hui sur le marché du polyéthylène téréphtalate (PET) vierge à 800 euros la tonne, alors que les matières recyclées sont hors de prix”, alertait début décembre Christian Théry, le président d’Elipso, l’association professionnelle des entreprises de l’emballage plastique. “Le PET a perdu brusquement 30 euros la tonne en octobre. Certaines sources prévoient des prix pouvant baisser jusqu’à atteindre 500 euros la tonne”, renchérissait le directeur général de l’organisation, Gaël Bouquet. Conséquence : fermetures de sites et suspension de projets à prévoir… À l’image de la litanie d’annonces de fermetures de vapocraqueurs et de réductions de capacités de production de la part des fabricants de matières qui investissent prioritairement en Asie.
Circularité à relancer et diversification à enclencher
Face aux difficultés économiques et aux injonctions sociétales, la circularité reste cependant la seule issue pour l’industrie de la transformation des plastiques. Ainsi, dans l’emballage, Elipso lance son plan 3P pour “Plastic Packaging Plan 2040”. Au programme : trois axes – décarbonation, lutte contre la pollution plastique et renforcement de la confiance dans la sécurité sanitaire – via 51 actions ciblées et concrètes mises en place de façon concertée avec l’ensemble des parties prenantes du secteur. Objectif du meilleur des trois scénarios envisagés : une diminution de l’empreinte carbone de la filière de 37 % en quinze ans.
Croitre autrement ce n’est pas renoncer à sa croissance et à ses fondements, c’est leur donner un nouveau sens, plus durable, plus performant et parfois plus créatif. Matériaux, technologies, marchés, la plasturgie a toujours su s’adapter.
— Julien Tardy, PDG et cofondateur du cabinet JTNH.
Une transformation espérée à moyen terme qui ne cache pas les difficultés que connaissent actuellement de nombreux transformateurs. “ Crise financière de 2009, crise énergétique, des matières premières, etc., la plasturgie vit aujourd’hui un énième moment charnière. On observe en 2025 une tendance à la décroissance en termes de CA, avec une perte moyenne estimée comprise entre 10 à 15 %”, expliquait Julien Tardy, PDG et cofondateur du cabinet spécialisé dans les cessions d’entreprises JTNH, invité début novembre à donner une conférence sur les stratégies de diversification à l’occasion des 40 ans de la filiale française du constructeur de presse allemand Arburg. Pour le spécialiste des fusions-acquisitions et du développement commercial en milieux industriels, il existe tout de même des perspectives positives, des actions à engager pour “trouver des solutions”. Expertise et exemples de réussites concrètes à l’appui, l’homme mets ainsi en avant quatre axes possibles de diversification : technique, économique, géographique et sectoriel. “Croitre autrement ce n’est pas renoncer à sa croissance et à ses fondements, c’est leur donner un nouveau sens, plus durable, plus performant et parfois plus créatif. Matériaux, technologies, marchés, la plasturgie a toujours su s’adapter”, observe-t-il. Encore aujourd’hui, même si elle doit faire face à un monde en transition aux équilibres chamboulés…


