La commission mixte paritaire n’a pas réussi à trouver d’accord sur le projet de loi de finances pour 2026. Pour permettre à l’Etat de continuer à fonctionner normalement après le 31 décembre, le gouvernement devrait opter pour une loi spéciale. Avant la reprise des débats budgétaires en janvier.
A peine une petite demi-heure pour acter un échec. Réunis en commission mixte paritaire ce 19 décembre, les sept députés et sept sénateurs qui devaient trouver un compromis sur le projet de loi de finances de 2026 n’ont pas réussi à se mettre d’accord. L’échec n’est pas vraiment une surprise, tant les positions des deux chambres étaient éloignées sur le budget. La dernière copie validée par le Sénat aurait fait plonger à 5,3% le déficit public pour 2026, en tenant compte du PLFSS de son côté définitivement adopté. Et ce alors que le gouvernement ambitionnait de limiter le déficit à 5% pour 2026.
Et maintenant ? «Conformément aux délais prévus par la constitution et les lois organiques, le parlement ne pourra donc pas voter un budget pour la France avant la fin de l’année», a commenté le Premier ministre Sébastien Lecornu dans une réaction sur le réseau X, en regrettant «l’absence de volonté d’aboutir de certains parlementaires».
Le Gouvernement prend acte de l’échec de la commission mixte paritaire dans laquelle siégeaient des députés et des sénateurs, sans le gouvernement.
Je remercie tous les parlementaires de tous les groupes qui ont travaillé et recherché, de bonne foi, un compromis raisonnable,…
— Sébastien Lecornu (@SebLecornu) December 19, 2025
Le Premier ministre va réunir lundi 22 décembre les principaux responsables politiques pour «les consulter sur la marche à suivre pour trouver les conditions d’une solution».
Vers une loi spéciale, comme un an plus tôt
Ses options sont en réalité très limitées. Pour éviter que la France ne se retrouve sans budget après le 31 décembre, le gouvernement de Sébastien Lecornu devrait préparer une loi spéciale, Matignon excluant l’option d’un recours à l’article 49.3. Un an plus tôt, son prédécesseur François Bayrou avait déjà dû recourir à une loi spéciale pour éviter un «shutdown» à la française. En pratique, celle-ci permet de prolonger le budget de 2025 pour l’année suivante, mais sans prendre de nouvelles mesures en matière d’impôt ou de dépenses.
Vos indices

Surtout, cette loi n’est censée être que temporaire : les discussions budgétaires sur le PLF 2026 devraient alors reprendre en janvier, pour tenter une nouvelle fois de dessiner un compromis sur de nouvelles bases. L’an dernier, les discussions avaient fini par déboucher au 15 février sur l’adoption définitive du budget 2025. Cette fois, l’équation s’annonce encore plus complexe compte tenu de l’échéance des élections municipales, en mars, qui va suspendre le travail parlementaire plusieurs semaines.
Pas de crédits supplémentaires pour la défense, pas de contribution exceptionnelle pour les grands groupes
Dans tous les cas, la loi spéciale risque d’être couteuse pour l’économie française. «La loi spéciale ne fait aucun choix, or nous avons besoin de dépenser plus pour la défense», a mis en garde François Villeroy de Galhau, le gouverneur de la Banque de France sur France Inter le 19 décembre. «Par ailleurs, la loi spéciale nous conduirait à un déficit nettement supérieur à ce qui est souhaitable car elle ne comporte pas de mesures d’économie ou de mesures fiscales». L’institut économique l’OFCE avait évalué le coût de l’hypothèse en octobre : en cas de loi spéciale étendue pour tout 2026, le déficit public atteindrait au mieux 5,5% du PIB. Les prélèvements obligatoires devraient ainsi baisser de 6,5 milliards d’euros avec la fin des contributions exceptionnelles censées s’éteindre fin 2025. Dans les faits, les entreprises devraient ainsi échapper à la prolongation de la taxe exceptionnelle sur les grands groupes prévue par le PLF pour 2026 (6 milliards d’euros anticipés). A contrario, elles ne verront pas non plus la couleur de la baisse de la CVAE prévue dans le PLF 2026.
A l’inverse, les dépenses de l’État ne pourront pas augmenter en valeur, en attendant le vote du budget. Les dépenses de guichet vont pouvoir continuer. Mais les dépenses d’investissements, qui ne sont pas considérées absolument nécessaires, et les subventions, devront attendre le vote du budget. Une nouvelle fois, la défense devrait être un des ministères les plus affectés. Ses investissements devaient augmenter de 6,7 milliards d’euros en 2026, dont 3,5 milliards supplémentaires ajoutés dans le PLF 2026.
Pour les entreprises qui dépendent de la commande publique, l’absence de budget risque de se traduire par un coup de frein sur l’activité début 2026. Il faudra ajouter le coût plus diffus de l’incertitude politique. Selon la Banque de France, celle-ci coûte déjà 0,2 point de PIB. Soit 6 milliards d’euros par an.


