
Pendant quatre mois un robot humanoïde a côtoyé les élèves du campus des métiers d’Orano Melox à Marcoule (Gard). Le spécialiste du combustible nucléaire teste le robot acheté par Capgemini à la société chinoise Unitree pour évaluer les apports d’une telle technologie.
Orano teste un robot humanoïde dans son école des métiers d’Orano Melox, à Marcoule (Gard). Une première pour un site nucléaire en France. Ce projet, d’une durée de quatre mois, doit prendre fin début 2026. Entre temps, Orano et Capgemini, qui fournit le robot humanoïde baptisé Hoxo pour ce projet, ont dressé une liste des cas d’usage sur lesquels tester le robot, en commençant par des gestes simples. L’objectif est de l’évaluer sur des tâches redondantes et récurrentes.
Un bipède «attachant»
«A la différence des robots industriels standards, la promesse de l’humanoïde est d’être adaptable au plus grand nombre de scénarios opérationnels avec une seule plateforme», explique Alexandre Embry, responsable du laboratoire d’expériences en robotique et IA de Capgemini. C’est pourquoi le cabinet de conseil a acheté ce robot auprès de l’entreprise chinoise Unitree, avec l’idée de tester les limites de l’approche humanoïde. «La diversité des scénarios testés est intéressante dans le cadre du partenariat avec Orano, ajoute Alexandre Embry. Le fait d’être connecté avec les contraintes opérationnelles, car les essais sont menés dans l’école des métiers, permet de s’entraîner et de pousser la technologie sans impacter la partie opérationnelle.»
Peu importe que le fabricant ne soit pas européen pour ces projets pilotes de «découverte», selon Alexandre Embry, qui indique que d’autres entreprises ont fait part de leur intérêt. Pierre Simonet, en charge de la performance et de l’innovation du site industriel de Melox, parle d’une «opportunité». Hoxo est «attachant, ajoute-t-il, avec ses chaussures noires en taille 34». Un avantage pour favoriser l’acceptation de ce drôle de bipède. Ce dernier vient «dynamiser des processus dans une industrie au temps long». Une façon pour Orano de renforcer son attractivité auprès des jeunes.
De l’IA à toutes les étapes
La première étape ? «Comprendre comment le robot peut nous aider dans nos tâches et adapter la technologie à nos environnements», selon Pierre Simonet. Des briques d’IA spécifiques sont développées : pour entraîner les modèles et apprendre au robot une tâche, pour l’aider à percevoir son environnement et à s’adapter, pour faciliter l’interaction avec le robot… Lorsque la brique technologique proposée par Unitree est suffisante, comme pour la détection d’obstacle, celle-ci est utilisée sur Hoxo. Mais Capgemini mise aussi sur ses connaissances dans le véhicule autonome pour booster le robot dans certains domaines comme la navigation, la perception de l’environnement et la localisation.
Côté déplacement, «Hoxo a commencé par suivre une personne sur une courte distance dans un environnement connu», glisse Alexandre Embry. Le robot appréhende son environnement et se repère. En parallèle, tout un pan de travail consiste à lui faire maîtriser la préhension de petits objets comme se saisir d’une gourde pour la déposer à un autre endroit.
Pour cela, «l’humanoïde est entraîné ou pré-entraîné sur différents scénarios», détaille Alexandre Embry. Cette phase d’entraînement est primordiale : il faut modéliser finement la tâche à réaliser, car l’apprentissage se fait par imitation. Une tâche chronophage. «L’ordre de grandeur est la semaine pour une activité très simple de ‘pick and place’ et plusieurs semaines voire mois pour des tâches plus complexes, précise Alexandre Embry. On cherche à faire baisser ce délai.»
A la recherche des bénéfices potentiels
En parallèle, Capgemini travaille sur des mains à cinq doigts indépendants et articulés, dotés d’un retour de force pour conférer une haute dextérité au robot. «Il est possible de simuler la préhension d’un objet pour que le robot reproduise le geste ensuite», affirme Alexandre Embry. Un sujet éminemment complexe, qui occupe nombre de chercheurs en robotique.
Arrive janvier et l’heure du bilan. Quels obstacles techniques reste-t-il à franchir ? Ce milieu est-il trop contraint pour cette technologie ? Faut-il tester d’autres robots ? Pierre Simonet imagine «un rendement financier possible sur des applications comme de la lecture de capteurs pas toujours connectés ou dont le prix de la connexion et du transfert des données est colossal». Mais d’autres cas d’usage restent à imaginer.


