Ad image

En Normandie, un fabricant de béton veut intégrer dans son process les eaux usées retraitées d’une usine d’andouille

Service Com'
Lu il y a 5 minutes



Le fabricant de béton Cemex, à Vire, travaille sur la réutilisation des eaux usées de l’usine charcutière Amand-Bianic voisine. Un projet mené avec l’école d’ingénieurs Builders.

Du béton saveur l’andouille. La formule peut prêter à sourire mais l’usine Amand-Bianic (87 salariés, 32 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2024) de Vire-Normandie (Calvados), spécialisée dans les andouilles et andouillettes, pourrait envoyer ses eaux usées, retraitées, vers son voisin, le fabricant de béton Cemex.

Le projet Re-Use Origine a été présenté, le 2 décembre, sur le site industriel du bocage. Ses premiers résultats sont encourageants, avec un procédé qui rend l’eau compatible avec les prérequis du producteur de béton. «Il reste à mieux faire sur les odeurs, confie Benoît Agnus, président de Scienteama, société caennaise spécialisée dans la recherche et développement technologique, très impliquée dans le projet. On travaille sur une filtration à base de textile. La prochaine étape sera de sortir une machine plus grande, fonctionnelle sur l’usine», à des volumes encore limités pour développer le dispositif.

Scienteama travaille avec l’école d’ingénieurs Builders sur Re-Use depuis deux ans (avec un soutien de la région Normandie à hauteur d’environ 260000 euros). Le projet s’inscrit dans une quête de réduction de la consommation d’eau chez les industriels du bassin virois après la sécheresse marquante de l’été 2022. Maxime Mouriaux, directeur industriel Est du groupe Popy (à qui appartient Amand-Bianic) était le directeur de l’usine calvadosienne à l’époque. Il refait la visite de ses anciens locaux : «on avait changé notre détecteur à rayons X, qui était refroidi à l’eau. Pour la pré-cuisson, des barattes de quatre tonnes ont été installées pour une économie de 200 mètres cubes d’eau par an. Les bains de cuisson ne sont plus changés que deux fois par semaine, contre tous les jours auparavant. On essaie aussi d’avoir de concentrer la production sur quatre jours pour économiser l’énergie et l’eau». À l’arrivée, une diminution d’environ 15% de la consommation d’eau… pour 260 tonnes de charcuterie produites en plus.

Alors que les eaux usées, très grasses et salées, sont traitées en sortie d’usine (traitement physico-chimique puis biologique) par l’industriel, l’idée de les aiguiller vers le fabricant de béton voisin avait déjà germé. Des analyses avaient mis en évidence plusieurs obstacles tels que «le chlorure de sodium, problématique pour le béton armé, des ions ou des sulfates», détaille Benoit Agnus. Il demeurait des traces de produit de nettoyage et, donc, trop d’odeurs de charcuterie. Le procédé, dont le brevet est en cours, a permis de lever quasiment tous ces obstacles. Romain Legrand, de Cemex, l’assure : «les premiers petits blocs de béton de test ont une odeur assez neutre, même si on peut mieux faire. Ils ont un bon aspect et sont de bonne qualité».

Il reste du chemin à parcourir. La prochaine étape va consister à sortir «une maquette», à disposer à la sortie de l’usine, qui opérera «en mètres cubes et non plus en litres», indique le directeur ingénierie de Builders, Guillaume Carpentier. L’ambition est de développer la machine à échelle industrielle, afin qu’elle soit commercialisée et ouvrir d’autres perspectives de valorisation de ces eaux. «L’espoir est là, s’enthousiasme Romain Legrand. Nous sommes déjà prêts à recevoir l’eau, la cuve est opérationnelle. De 193 litres d’eau pour faire un mètre cube de béton en 2022, nous sommes passés à 173. On aurait besoin de 15 à 20 mètres cubes d’eaux usées d’Amand-Bianic par jour pour être à zéro». Autant d’eau qui ne serait plus pompée sur le réseau classique, sur un territoire au sol granitique très vulnérable aux épisodes de sécheresse. En 2022, au cœur de la crise, les services de l’État avaient enjoint les industriels du secteur à baisser leur consommation d’eau de 20%.



Source link

Share This Article
Laisser un commentaire