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Pour Qwant, “l’Autorité de la concurrence a manqué de courage” dans le dossier l’opposant à Microsoft

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Lu il y a 7 minutes



L’entreprise française Qwant, qui développe un moteur de recherche souverain, réagit vivement à la décision de l’Autorité de la concurrence dans le cadre de sa plainte déposée contre Microsoft. Pour elle, au-delà de la recherche sur le web, l’enjeu réel est le verrouillage du marché de l’IA générative.

L’Autorité de la concurrence a rejeté le 27 novembre la plainte déposée par Qwant contre Microsoft pour pratiques anticoncurrentielles. Le moteur de recherche français, rachete en 2023 par Octove Klaba (fondateur d’OVHcloud) après une histoire compliquée sous la direction notamment d’Éric Léandri, avait anticipé ce résultat et va interjeter appel de cette décision.

“Nous nous y attendions suite à l’audience du 1er juillet qui était très à charge contre nous malgré le fait que c’était nous qui portions plainte, commente Olivier Abecassis, directeur général de Qwant depuis 2023. Les éléments de la décision sont d’ailleurs ceux qui avaient été évoqués en séance. »

L’ombre de Google

Élément clé de la décision : la différence de puissance entre Microsoft (avec Bing) et le numéro un du marché, Google, qui domine complètement le paysage de la recherche sur le web. Une interprétation faussée par le fait que Google ne propose pas sa technologie en syndication, d’après Qwant.

“Google n’offre pas sa technologie à des tiers, et la décision récente du juge Mehta aux Etats-Unis pointait justement du doigt ce problème. Et en son absence, Microsoft dispose bel et bien d’une position dominante sur le marché de la syndication de services de recherche, dont dépendent tous les moteurs alternatifs.”

Olivier Abecassis ne cache pas son amertume : « UN l’heure de la souveraineté numériquec’est surprenant d’être livré en pature par l’Autorité de la concurrence à un acteur américain connu pour ses pratiques de ventes liées et de pratiques anticoncurrentielles. Nous en sommes très déçus. »

Microsoft a arrêté l’API Bing Search au profit de services IA

Au cœur du problème se trouve l’accord entre Qwant et Microsoft pour utiliser ses technologies de recherche mais aussi son réseau publicitaire Microsoft Advertising. La firme de Redmond, qui considère la plainte de Qwant infondée, avait fortement augmenté les tarifs de son API Bing Search en 2023. Elle a depuis mis fin à ce service, effectif au 11 août 2025, mettant en avant à la place “Grounding with Bing Search” un service de RAG pour agents IA.

“Entre 2023 et 2024, Microsoft a divisé nos revenus par deux, récrimine le DG de Qwant. Le fait qu’on soit encore vivants ne veut pas dire que tout va bien et qu’il n’y a eu aucun impact. Ma déception tient au fait que cela méritait compensation, et c’était pour réinvestir dans notre propre technologie. Ce n’est pas de l’argent pour des actionnaires, mais pour embaucher 10 ingénieurs de plus en France afin d’aller plus vite dans nos propres déploiements. Les revenus dont Microsoft nous a privé nous aurait aidé à faire ces recrutements.”

Le passif de Qwant

Il est évidemment difficile de ne pas évoquer l’histoire compliquée de Qwant, faite de promesses non tenues, qui a pu peser dans cette décision. “Oui, cela nous a sûrement fait du tort, mais on a tout refait du sol au plafond depuis deux ans donc ça n’a plus rien à voirse défend Olivier Abecassis. Ils nous l’ont dit dans les remarques d’audience, que ça fait 14 ans que nous développons la techno, mais j’ai trouvé ça un peu déplacé. Octave [Klaba] a eu le courage d’avoir cette vision et de faire fi du passé. On a la volonté d’avoir une autre histoire.”

Au mois d’août, Qwant et son partenaire allemand Ecosia ont commencé à fournir des résultats de recherche basés sur Staanun index de recherche qu’ils ont développé en commun. “Notre technologie sert une requête sur deux en France, et plusieurs entreprises testent notre API. Ce premier business est déjà opéré. On ne couvre que le français aujourd’hui, mais on aura l’allemand au premier trimestre 2026 puis on fera l’anglais.”

L’enjeu de l’IA générative

En réalité, l’enjeu va au-delà des moteurs de recherche et touche aussi à la révolution de l’intelligence artificielle générative. Une émergence dont découle la décision de Microsoft concernant l’API Bing Search, selon Olivier Abecassis. “Les services d’IA doivent avoir accès aux données du web pour être efficaces, c’est la force de Google et ils ne le rendent pas public. Microsoft a arrêté de le faire et ce n’était pas un hasard.”

La tentation de simplement s’en remettre aux leaders américains est grande, reconnaît le dirigeant. “Au départ notre brique d’IA était prototypée sur OpenAI et puis j’ai dit stop, on bascule sur Mistral. Il faut prendre sur soi, avoir du courage.” Pour le directeur général de Qwant, “l’Autorité de la concurrence a manqué de courage sur ce dossier. Ils n’ont pas voulu s’embêter avec les problèmes d’un petit acteur français car cela aurait nui aux dossiers qui sont en cours contre Google.”

“Mais ce faisant ils ratent une décision à l’impact colossal, qui est liée à la nécessité pour les grands acteurs de donner accès aux infrastructures fondalementales pour que les autres puissent bâtir dessus. C’est une responsabilité écosystémique et c’est ça que Bing a changé en 2023. L’excuse de Microsoft c’était que le coût de l’électricité avait augmenté, alors que c’était concomittant au lancement de Copilot.”

Qwant se présente désormais comme contribuant à la construction d’un écosystème européen de l’IA. “La souveraineté il faut la faire, pas en parler. L’enjeu pour nous c’est de mettre notre technologie sur le marché”, conclut Olivier Abecassis. Avec toujours des lignes directrices d’ouverture, de responsabilité environnementale et de respect des ayants-droits.



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