Depuis le site de La Janais, à Rennes, Mayers Buildtech fait valoir son savoir-faire dans la construction hors-site avec l’édification d’une grande résidence étudiante dans la ville. La PME mise sur un abaissement progressif de ses coûts et sur l’évolution de la réglementation environnementale pour monter en puissance.
A Rennes (Ille-et-Vilaine), depuis décembre dernier, 481 modules sont en cours de livraison, assemblés façon Lego pour construire une résidence étudiante, pour les besoins de l’école de commerce Rennes Business school. C’est le plus grand projet de construction hors-site en France.
Franck Stassi Les squelettes en béton des bâtiments sont prêts à accueillir les modules préfabriqués en usine.
Franck Stassi L’un des bâtiments prend forme…
Autour d’un cœur en béton qui abrite ascenseurs, escaliers et couloirs, et sur un socle en béton qui regroupe les services communs en rez-de-chaussée, des boîtes préfabriquées en bois sont montées sur les squelettes des bâtiments de trois à cinq étages. Chaque boite est une chambre de 18,1 m² en moyenne, dont la pièce de vie, la salle de bain et le coin cuisine sont prêts pour l’emménagement – ne reste qu’à faire les raccordements.
«Le gros œuvre travaille au centimètre ; nous travaillons au millimètre. Les camions apportent les modules de chambres, une grue les lève, et nous ajoutons des ferrures métalliques pour les fixer par l’extérieur. La construction de l’essentiel du bâtiment hors du site de chantier réduit la pénibilité», explique Bilal El Ouardi, le conducteur de travaux de ce chantier nommé Constellation.
De la laine de roche, pour la protection incendie, est ajoutée entre les modules. L’habillement de la façade suivra. Six à huit mois de moins qu’un chantier traditionnel sont estimés pour cet ensemble immobilier, qui doit ouvrir à la rentrée scolaire 2025, après un montage réalisé par l’entreprise spécialisée Euro-Performance.
Franck Stassi …tandis que l’intérieur de chaque module est prêt pour l’emménagement des étudiants, prévu à la rentrée 2025.
Les opérations de montage internalisées en usine
Les modules sont fabriqués à une dizaine de kilomètres, sur un site que les experts de l’automobile connaissent bien : la zone industrielle de La Janais, à Chartres-de-Bretagne (Ille-et-Vilaine), où se situe une usine du groupe Stellantis, dont l’emprise s’est fortement réduite au fil des années. Dans l’un des bâtiments, 55 employés et 20 intérimaires construisent donc des appartements préfabriqués pour le compte de Mayers Buildtech, une PME spécialisée dans la construction hors-site, qui a démarré sa production à La Janais en 2022.
«Les constructeurs en bois n’étaient pas forcément au rendez-vous ; nous rencontrions des problèmes de qualité et de coûts», indique Luc Belot, le vice-président de Mayers Buildtech, qui a figuré jusqu’en mars dernier parmi les dirigeants du promoteur immobilier Réalités, à l’origine de la création de l’entreprise.
Franck Stassi Dans l’usine de Mayers Buildtech, les pertes sont limitées à 4% sur le bois.
En prenant à sa charge une partie de la construction des bâtiments, le promoteur a mis un pied dans l’industrie. «Nous avons internalisé toutes les opérations, dont le bureau d’études. Nous standardisons au maximum les modules, ce qui permet d’avoir une vraie démarche industrielle, de mécaniser le plus de tâches possibles, et de réduire les pertes, limitées à 4% sur l’ossature bois», illustre Quentin Goudet, le vice-président de Mayers Buildtech, en présentant la gamme d’appartements qu’il peut livrer, ou bien un programme de maisons réalisé début 2024 à Cherbourg-Octeville (Manche) initialement pour accueillir des familles venues en renfort chez Naval Group – les collectivités locales ont conservé le projet malgré la perte du contrat des sous-marins australiens.
Franck Stassi L’isolation des panneaux de bois est réalisé par les ouvriers, en usine.
Le bois utilisé dans l’usine est européen en totalité. L’outil industriel est calibré pour réaliser soit des façades seules, soit des modules entiers. Une fois le bois débité et les panneaux de bois découpés, l’ossature des modules prend forme, en passant de la 2D à la 3D.
Franck Stassi Parés d’une protection pour la pluie, les modules prennent forme à raison de 2 chambres par jour. Le passage de la production en 2×8 pourra permettre d’atteindre la production de 800 à 1000 modules par an.
Selon la typologie des projets, de la ouate de cellulose ou de la laine de verre, comme dans le cas du projet Constellation, assure l’isolation. Après la phase d’étanchéité et de menuiserie, vient celle de la pose des portes, des fenêtres, des équipements électriques et des cuisines et salles de bains. Les parements intérieurs suivent, permettant de donner vie à des appartements. La pose du plafond permet de fermer chaque boîte.
Un site appelé à déménager
«Le marché du hors-site progresse comme il le devrait. Le ministre du Logement, Guillaume Kasbarian, a suggéré d’accroître le recours à cette technique pour accélérer la production. Nous bénéficions des attentes liées à la qualité environnementale des projets, avec le bois et le contrôle de la qualité en usine, et de la rapidité d’exécution des chantiers», se réjouit Luc Belot.
Le dirigeant estime que les coûts, plus élevés que ceux de la construction traditionnelle à date, vont se rapprocher, et que les seuils 2025 et 2028 de la réglementation environnementale RE2020 sur les bâtiments neufs permettront d’apporter un avantage compétitif à la technique.
Le bail de l’usine de La Janais (14 000 m², 400 mètres de long) ne sera pas renouvelé. Mayers Buildtech prospecte en Bretagne et en Pays-de-la-Loire pour trouver un local plus grand, malgré plusieurs contraintes (12 mètres de hauteur sous plafond, installation classée pour la protection de l’environnement…) Une deuxième usine, à l’Est de l’Ile-de-France, est par ailleurs évoquée, mais nécessitera l’arrivée de nouveaux investisseurs.
Photos: Franck Stassi.
