Ad image

Europol cible un système de blanchiment via l’Allemagne

Service Com'
Lu il y a 5 minutes


Les autorités européennes ont neutralisé un vaste réseau criminel exploitant des prestataires allemands pour blanchir des millions d’euros issus de fraudes à la carte.

Entre 2016 et 2021, un groupe international aurait détourné des données de 4,3 millions de cartes bancaires pour créer 19 millions de faux abonnements sur des sites de streaming, de rencontres et pornographiques. Ces plateformes, invisibles pour les moteurs de recherche, prélevaient discrètement des montants mensuels d’environ 57 $ (53,1 €), rendant les fraudes difficiles à détecter.

VEILLE ZATAZ : NOUS RECHERCHONS VOS DONNÉES PIRATÉES. DÉCOUVRIR

Blanchiment numérique sous couvert d’entreprises légitimes

Selon le BKA et la Generalstaatsanwaltschaft de Coblence, cette opération baptisée « Chargeback » a mobilisé plus de 250 agents en Allemagne, dans huit Länder différents. L’enquête, menée conjointement avec la Financial Intelligence Unit (FIU) et la BaFin, a permis la saisie de 35 millions d’euros d’actifs et l’exécution de 18 mandats d’arrêt internationaux. Les suspects auraient abusé de l’infrastructure de quatre prestataires allemands de services de paiement pour faire transiter des flux financiers frauduleux via des circuits bancaires légitimes.

Le préjudice total dépasse 300 millions d’euros, et le dommage potentiel, fondé sur des tentatives d’opérations bloquées, est estimé à 750 millions d’euros. Plus de 2 000 sites frauduleux, principalement dédiés au streaming et aux rencontres, auraient servi à générer ces transactions. Le système reposait sur environ 500 sociétés écrans enregistrées au Royaume-Uni et à Chypre, chacune gérant plusieurs sites. Ces entités provenaient de fournisseurs de services dits « Crime-as-a-Service », qui proposaient des sociétés clés en main avec faux dirigeants et documents KYC falsifiés.

Une manipulation interne du système de paiement

Parmi les 44 personnes mises en cause, six anciens responsables de la conformité et du risque issus d’entreprises de paiement allemandes, canadiennes et autrichiennes auraient collaboré avec les réseaux criminels. Leur rôle : permettre l’intégration des transactions frauduleuses dans le trafic financier légal. Un logiciel interne aurait été manipulé pour contourner les contrôles de risque, facilitant le passage des flux douteux.

Les enquêteurs ont également identifié un programme développé pour dissimuler l’origine de plus de 150 millions d’euros via des comptes virtuels. En tout, plus de 100 000 opérations de blanchiment ont été retracées.

Une coopération transnationale sans précédent

L’enquête, appuyée par Europol et Eurojust, a mobilisé des autorités au Royaume-Uni, au Canada, au Luxembourg, aux Pays-Bas, à Singapour, en Espagne, aux États-Unis et à Chypre. Cette collaboration illustre la montée en puissance de la coopération judiciaire européenne face à un blanchiment numérique sophistiqué, utilisant l’infrastructure même des paiements réglementés.

Dans une opération parallèle, neuf personnes ont été arrêtées à Chypre, en Espagne et en Allemagne pour leur rôle présumé dans un réseau d’escroquerie aux investissements en cryptomonnaies évalué à près de 700 millions $ (652,8 millions €). Selon Eurojust, ce groupe avait créé des dizaines de fausses plateformes d’investissement qui imitaient des sites légitimes, promettant des rendements spectaculaires. Les victimes, attirées par de fausses publicités, des appels à froid et des témoignages inventés de célébrités, transféraient leurs cryptomonnaies sans jamais pouvoir les récupérer.

Les crypto-actifs volés étaient ensuite blanchis grâce à des techniques complexes de traçage sur la blockchain. Les autorités ont saisi 1,5 million € (1,7 million $) en numéraire et en cryptomonnaies, ainsi que pour 100 000 € (115 000 $) de montres de luxe. Le parquet de Paris a confirmé que six mandats d’arrêt internationaux avaient été émis contre des suspects, à la suite de plaintes transmises en 2023 par la JUNALCO, l’agence française de lutte contre la criminalité organisée.

Cette affaire s’ajoute à une autre opération, en septembre dernier, ayant visé un réseau similaire responsable d’au moins 100 millions € (115 millions $) de pertes.

NE MANQUEZ PAS NOTRE NEWS LETTER (CHAQUE SAMEDI). INSCRIPTION

Entre fraude bancaire, manipulations internes et crypto-escroqueries, l’Europe fait face à une criminalité financière polymorphe. Le modèle « Crime-as-a-Service », combiné à des failles dans la chaîne du paiement numérique, démontre la fragilité d’un écosystème mondialisé. Les opérations coordonnées d’Europol et de la FIU signalent une prise de conscience institutionnelle : seule une coopération technique et judiciaire étroite permettra de contrer durablement ces schémas. Reste à savoir si les régulateurs européens sauront anticiper la prochaine génération de fraudes financières.



Source link

Share This Article
Laisser un commentaire