Ils récupèrent, vérifient et réinstallent des ordinateurs pour des familles, des écoles et des associations. Une promesse simple, une méthode rigoureuse, un effet direct sur l’inclusion numérique.
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Les rencontres qui font ma vie, qui font ZATAZ, ne cessent pas d’être passionnantes. Et cela fait plus de 30 ans que ça dure. Que se soit des pirates, des escrocs, des victimes, les autorités, des associations, des écrivains, des chercheuses, etc. Bref. Des hommes et des femmes qui ont toutes et tous quelque chose à partager. Et certaines de ces rencontres sont éclairantes sur l’espoir que nous devons avoir en l’avenir. Aujourd’hui, une association qui transforme le gaspillage informatique en levier social local. Le projet de l’asso’ « Les ordis du cœur » est réemployer des ordinateurs déclassés d’entreprises et d’administrations, installer des systèmes libres, former les usagers. Limiter la surproduction, la surconsommation et le gaspillage numérique, tout en renforçant la souveraineté numérique. Découverte !
Du gaspillage au réemploi utile
Le point de départ est clair. Des ordinateurs réformés partent trop vite à la benne alors qu’ils restent opérationnels. Des systèmes propriétaires imposent des mises à jour lourdes. Le matériel devient « obsolète » par logiciel, pas par panne. L’association « Les ordis du cœur » intervient sur ce biais. Elle récupère les machines auprès d’entreprises et d’administrations, formalise des conventions de don et de cession pour garantir la traçabilité, organise la collecte et le stockage, puis audite chaque poste. Quand c’est pertinent, elle propose des « solutions alternatives » en installant des distributions GNU/Linux adaptées aux usages réels des bénéficiaires.
La chaîne est simple et exigeante. D’abord identifier le destinataire avec l’appui des centres communaux d’action sociale, des écoles, des mairies et des associations d’utilité publique. Ensuite préparer le poste, changer le disque quand nécessaire, ajouter de la mémoire si utile, sélectionner une distribution qui tourne bien sur la configuration. Enfin installer et sécuriser l’environnement, remettre au bénéficiaire et accompagner la prise en main. Ce phasage réduit le gaspillage, abaisse le coût d’accès pour l’usager, et crée de la valeur localement par le travail de diagnostic, de remise en service et d’accompagnement.
Le public ciblé est volontairement large. Le grand public reçoit des postes adaptés aux besoins essentiels. Les écoles primaires obtiennent des unités fixes en fond de classe, après présentation de l’environnement Primtux à l’équipe éducative, pour créer un pôle pédagogique supplémentaire. Les étudiants accèdent en priorité aux portables, identifiés via des partenaires sociaux comme les CCAS. Les associations à vocation sociale et solidaire s’équipent pour leurs propres activités. L’orientation repose sur le besoin, pas sur le prestige de la machine.
L’association, basée dans les Hauts-de-France, au sud de Lille, pose une limite rationnelle. Tous les ordinateurs ne méritent pas une extension de vie. Les très vieux modèles consomment plus qu’ils ne rendent de service, l’installation y est laborieuse quand l’USB ou le réseau ne suffisent pas, et certaines références s’avèrent récalcitrantes. Malgré cela, le taux de réussite dépasse 90 % sur les appareils encore aptes à l’usage. Quelques Packard Bell et certains Chromebook résistent, la règle reste l’exception.
Un chiffre cadre l’enjeu régional. Selon une étude d’Emmaüs Connect financée par le fonds régional FRATRI, près de 200 000 ordinateurs sont jetés chaque année dans les Hauts-de-France. Sur cette masse, 130 000 pourraient être réemployés en remplaçant le disque et, si besoin, la mémoire vive. Le besoin social est tout aussi net. Toujours selon cette étude, 17 % des habitants de la région n’ont pas de matériel personnel, soit 220 000 personnes. Le réemploi local répond donc à un double déficit, économique et social, et corrige un biais industriel coûteux.
Un modèle open source, une souveraineté concrète
Le cœur technique du projet tient dans le choix des logiciels libres. Le libre offre une alternative stable, sécurisée, sans publicité, soutenue par des communautés massives d’utilisateurs et de développeurs. Il permet de redonner une utilité à des ordinateurs que les nouvelles versions de Windows ou de Mac OS X excluent. Il permet aussi d’ancrer l’accompagnement dans une logique d’apprentissage, pas de consommation passive.
Pour le grand public, l’association installe prioritairement Linux Mint Cinnamon, parfois Zorin OS. Ces environnements conviennent à la majorité des usages quotidiens. Pour les écoles, elle déploie Primtux, solution taillée pour les enseignants et les élèves, fonctionnelle même sans accès internet. Cette capacité hors ligne renforce la sécurité des enfants et garantit la continuité pédagogique. L’environnement, reconnu en France par le ministère de l’Éducation nationale et soutenu par la Direction interministérielle du numérique, devient un levier concret d’égalité d’accès à l’outil scolaire. À domicile, c’est une aubaine pour les parents et les grands-parents, qui récupèrent des postes fiables, dédiés et rassurants.
Le réseau de partenaires donne l’épaisseur au dispositif. En Hauts-de-France, l’association coopère avec NIRD, Oisux, Primtux et Les Amis de Mandela. Elle se connecte à une communauté mondiale d’acteurs attachés à l’intelligence collective, au numérique libre, sobre et souverain. Ces partenaires produisent, maintiennent et partagent des communs numériques. La coopération n’est pas un slogan. Elle s’incarne dans la documentation partagée, les images d’installation, les configurations types, les scripts de déploiement et les retours d’expérience.
La logistique est mutualisée. Les communes et les entreprises prêtent des espaces de stockage et des moyens de transport. Les lycées et l’enseignement supérieur peuvent assurer des services de proximité. Les conventions encadrent le don ou la cession, garantissent la traçabilité, et protègent les données. Cette traçabilité est essentielle. Elle sécurise les donateurs sur la destruction des informations précédentes et protège les bénéficiaires sur l’origine et l’état du matériel reçu.
Le volet formation est systématique. La remise d’un ordinateur réinstallé s’accompagne d’une prise en main. Les mercredis d’entraide, les repair cafés et d’autres événements servent de point d’appui. On y apprend à naviguer dans un environnement libre, à mettre à jour sans frictions, à installer des applications utiles, à adopter des gestes de sécurité numérique de base. L’association transforme ainsi la remise d’un objet en construction d’une autonomie. C’est un transfert de compétences qui s’ajoute au transfert de matériel.
Enfin, le modèle préserve la souveraineté numérique. En promouvant des logiciels libres et des communs, la dépendance à des éditeurs fermés s’allège. Les coûts de licences disparaissent. Les données restent maîtrisées. Les écoles, administrations et associations conservent la latitude de comprendre, d’adapter et de pérenniser leurs outils. Cette souveraineté n’est pas un discours abstrait. Elle découle de choix techniques concrets et documentés, à l’échelle locale.
À force de conventions, de distributions libres et d’ateliers d’entraide, cette association construit une filière de réemploi qui rend l’inclusion numérique tangible. Le geste est local, l’effet est systémique. La souveraineté numérique cesse d’être un slogan quand des postes fonctionnent, que les données restent maîtrisées et que les compétences circulent. Vous avez trés certainement une association prêt de chez vous, prête à faire battre un nouveau cœur aux ordinateurs.


