Au mois de mars, vous aviez formé 20 000 personnes en France, sur 290 000 dans le monde. Où en êtes-vous aujourd’hui ?
Julien Nicolas : Nous avons formé 25 000 salariés sur 160 000 salariés en France.
Soit un salarié français de la SNCF sur six, environ. Cela veut-il dire qu’une partie seulement des métiers pratiqués à la SNCF seront transformés par l’IA ?
Julien Nicolas : Non, l’intelligence artificielle transformera tous les métiers, notamment aux fonctions support, finances, achats, juridique, communication… L’IA va également modifier les métiers du numérique, ainsi que ceux exercés par les agents de la relation-client et à bord des trains. Idem dans pour la partie industrielle : dans les technicentres et dans les métiers liés à l’infrastructure, nous donnons aussi accès à des outils IA.
Quels sont les métiers les plus fortement impactés ?
Julien Nicolas : Encore une fois, tous les métiers sont impactés. En termes de déploiement au sein de la SNCF, dans les métiers du numérique, nous les dotons de solutions pour coder et faire des tests automatiquement par exemple. Nous leur donnons accès à la solution française Mistral AI : concrètement, les développeurs vont très vite intégrer l’IA dans leur quotidien. Sur les fonctions support, nous avons créé notre « SNCF GPT » qui permet d’accéder à des documents et de faire des analyses, des résumés, de la traduction. Le troisième pan de métiers concerne l’industriel : dans la maintenance, nous commençons à entraîner des modèles qui vont ensuite aider nos collaborateurs à anticiper des interventions permettant d’éviter une panne.
Pour SNCF GPT, vous avez mis en place un modèle RAG (Retrieval Augmented Generation, ou génération augmentée de récupération) ?
Julien Nicolas : Oui, nous avons une fonction RAG mais pas seulement. Nous avons des fonctions équivalentes à celles d’un Le Chat ou de ChatGPT : vous pouvez lui poser des questions larges et vous aurez des réponses dans un environnement sécurisé. Nous avons chargé des documents SNCF et vous pouvez donc l’interroger sur des connaissances propres à l’entreprise. Vous pouvez également télécharger des documents comme le dernier magazine L’Echo touristique, qu’il est d’ailleurs possible de faire traduire en espagnol.
Ce RAG traduit également une volonté de ne pas alimenter les LLM (Large Language Models) avec vos propres données ?
Julien Nicolas : Oui, nos données doivent rester dans l’environnement SNCF. C’est notre savoir-faire et des éléments importants (à préserver, NDLR), face à la concurrence. Nous voulons que cette richesse n’alimente pas d’autres bases de données et empêcher des fuite de données.
Ce GPT SNCF, c’est finalement comme une boîte noire qui mélange cloud et IA ?
Julien Nicolas : Exactement. Sur notre environnement sécurisé, nous accédons à différents LLM : OpenAI, Mistral, Claude d’Anthropic et d’autres. Nous sensibilisons aussi les collaborateurs à l’impact en émissions de CO2 des requêtes. Le numérique, incluant l’IA, représente 2% du bilan carbone du groupe.
Quel pourcentage des collaborateurs utilisent SNCF GPT ?
Julien Nicolas : Aujourd’hui, il est ouvert à 100 000 collaborateurs, sur 160 000 en France. Et 15 000 l’utilisent de manière régulière. Il reste un sujet d’acculturation. Nous avons un grand plan de formation sur l’IA, les outils, la rédaction de prompts.
Y a-t-il encore des réticences ?
Julien Nicolas : Il n’existe pas de réticences ni de vraie peur. Il y a plutôt des interrogations et des attentes en termes d’outils, d’accès, d’accompagnement. Nous avons également des réunions d’information avec les organisations syndicales sur ce que nous développons.
Quelles sont les priorités 2025 dans l’IA ?
Julien Nicolas : La première, c’est la formation et l’acculturation des collaborateurs. La deuxième, c’est de les doter de bons outils. Le troisième, c’est pour les clients. Le bot historique de SNCF Connect a ainsi basculé sur des LLM, ce qui lui permet d’être plus précis.
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