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le fléau grandissant du pig butchering

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Lu il y a 9 minutes


Une arnaque redoutable mêlant sentiments et fraude financière, appelée « pig butchering », se propage à grande vitesse sur les applications de rencontre, exploitant solitude, IA et crypto pour dépouiller les victimes.

Derrière le masque séduisant d’un profil romantique sur une application ou un réseau social se cache parfois une redoutable machine de manipulation. Baptisée « pig butchering », cette arnaque venue d’Asie du Sud-Est combine ingénierie sociale, intelligence artificielle et techniques d’usurpation d’identité pour piéger des internautes dans des escroqueries amoureuses aux conséquences financières dramatiques. Les victimes, souvent isolées émotionnellement, sont d’abord charmées puis poussées à investir dans des projets frauduleux avant d’être purement et simplement dépouillées. Ce phénomène gagne rapidement du terrain, notamment en Europe. Il révèle une nouvelle dimension inquiétante du cybercrime, où l’émotion devient une arme aussi efficace que la technologie.

À première vue, tout commence comme une histoire banale. ZATAZ vous en relate, malheureusement, beaucoup. Une rencontre sur une application, un échange agréable, une connexion fluide entre deux personnes qui semblent se découvrir par hasard. On les aperçoit, sur certains réseaux sociaux, proposant de vous parler, dans les commentaires que vous auriez pu poster sur Facebook par exemple.

Mais rapidement, cette relation prend une tournure inhabituelle. La personne à l’autre bout du fil, souvent une jeune femme, semble avoir besoin d’aide : un mauvais numéro, un guide touristique égaré, une situation un peu confuse. Rien d’alarmant au départ. Puis les discussions s’intensifient. Le ton devient intime. La confiance s’installe.

C’est ici que débute ce que les spécialistes de la cybersécurité appellent la phase d’ »engraissement« . La victime est flattée, valorisée, et reçoit quotidiennement des messages attentionnés, souvent rédigés de façon impeccable et cohérente, comme s’ils émanaient d’une personne parfaitement adaptée à ses attentes affectives. En réalité, ce n’est pas un individu, mais une construction. Grâce à l’intelligence artificielle, les escrocs sont aujourd’hui capables de générer un « interlocuteur parfait » : réactif, empathique, séduisant, jamais conflictuel. L’absence des inconvénients habituels d’une relation réelle, quiproquos, tensions, incompréhensions, renforce l’illusion. L’intelligence artificielle permet de bâtir un partenaire émotionnel sur mesure, capable de répondre à toutes les attentes d’une victime en quête de lien.

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Les cybercriminels, opérant principalement depuis des pays basés en Afrique ou encore la Birmanie, la Thaïlande ou le Cambodge, ont industrialisé cette arnaque à grande échelle. Derrière chaque faux profil se cache souvent une organisation bien rodée, fonctionnant comme une entreprise, avec des scripts, des cibles définies et une stratégie claire : instaurer une relation émotionnelle, puis proposer un « projet d’investissement commun« , souvent basé sur des placements en crypto-monnaies ou dans des « start-ups asiatiques prometteuses« .

Une fois la victime convaincue, elle est dirigée vers une plateforme d’investissement frauduleuse, conçue pour imiter les sites légitimes. Elle y voit ses gains fictifs augmenter rapidement. Tout semble se dérouler comme prévu. Poussée par l’appât du gain, mais aussi par la confiance désormais ancrée dans la relation avec son interlocuteur, la victime augmente progressivement ses mises. Il n’est pas rare que les sommes atteignent plusieurs dizaines, voire centaines de milliers d’euros.

« Le pig butchering repose sur une illusion affective si bien construite que la victime accepte d’investir sans soupçonner la supercherie. »

Les pertes sont souvent considérables. En Chine, aux États-Unis, au Royaume-Uni, les autorités multiplient les alertes. Interpol, Europol, le FBI et diverses agences nationales ont toutes émis des mises en garde concernant cette pratique en plein essor. En France, plusieurs plaintes ont déjà été déposées auprès de la plateforme Pharos, chargée de la lutte contre les contenus et comportements illicites en ligne. Dans l’émission « Ca peut vous arriver » sur RTL et M6 chez qui j’ai la chance de chroniquer, l’un des cas rencontré dépassé, les 150 000€ !

Mais ces alertes arrivent souvent trop tard. Les plateformes utilisées pour collecter l’argent, qu’il s’agisse de portefeuilles en cryptomonnaies ou de comptes bancaires ouverts sous de fausses identités, permettent un blanchiment rapide et opaque des fonds. Les victimes, elles, se retrouvent non seulement ruinées, mais aussi profondément blessées sur le plan émotionnel. Car à la perte d’argent s’ajoute celle d’une relation en laquelle elles avaient réellement cru.

Ce qui rend ces arnaques particulièrement pernicieuses, c’est leur capacité à s’adapter. L’usage des deepfakes, qui permettent de générer de faux visages animés réalistes, ajoute une couche supplémentaire de crédibilité. Certains fraudeurs organisent même de fausses visioconférences où l’image d’une femme charmante bouge et parle, apparemment en direct, renforçant encore l’illusion de réalité. À l’autre bout, la victime ne se doute pas qu’elle converse avec un programme dopé à l’IA ou avec un opérateur suivant un script.

Dans ce contexte, les frontières entre fiction et réalité s’effacent. Ce n’est plus seulement l’argent qui est visé, mais la conscience même de la victime, sa capacité à discerner le vrai du faux. Le piège est d’autant plus redoutable qu’il cible une faille humaine universelle : le besoin d’être aimé, compris, valorisé.

Selon les dernières données disponibles, les pertes cumulées liées à ces arnaques dépassent plusieurs milliards de dollars dans le monde. Rien qu’aux États-Unis, la Federal Trade Commission estime que les escroqueries amoureuses ont coûté plus de 1,3 milliard de dollars (environ 1,2 milliard d’euros) en 2023, dont une part significative est attribuée aux méthodes de pig butchering. En Europe, le phénomène reste encore sous-estimé, notamment en raison du tabou qui entoure ces fraudes sentimentales.

« En mêlant amour, IA et finance, le pig butchering marque un tournant inquiétant dans l’histoire du cybercrime. »

Pour les experts, il est urgent de renforcer la sensibilisation, tant du grand public que des professionnels de la cybersécurité et des forces de l’ordre. Il s’agit non seulement de reconnaître les signaux d’alerte – comme une relation trop parfaite, des demandes financières déguisées ou une insistance sur des investissements rapides –, mais aussi de former les plateformes sociales et de rencontres à détecter et bloquer ces profils suspects.

Certaines initiatives commencent à émerger. Tinder, Bumble et autres géants du dating en ligne investissent désormais dans des outils de vérification de l’identité et dans l’analyse comportementale. De même, plusieurs start-ups européennes développent des technologies d’authentification faciale capables de repérer les deepfakes. ZATAZ intervient dans de nombreux clubs de personnes âgées ou encore dans des écoles d’aides soignants pour faire passer le message. Alerter les autres, c’est les protéger !

Mais les arnaqueurs, eux aussi, affinent leurs techniques, rendant cette guerre de l’information particulièrement complexe.

À une époque où l’IA devient omniprésente dans nos vies numériques, le pig butchering illustre les dangers d’une technologie sans garde-fou éthique. Elle permet de créer des simulacres de relations parfaites, taillés sur mesure pour tromper et manipuler, dans un monde où l’émotion devient monétisable. Prudence, et prenez soins de vos proches.

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