Une campagne d’influence numérique liée à la Chine cible le Premier ministre canadien Mark Carney à l’approche des élections fédérales du 28 avril, selon les autorités d’Ottawa.
Alors que le Canada s’apprête à vivre une nouvelle séquence électorale, le gouvernement sonne l’alarme sur une opération de désinformation sophistiquée orchestrée via l’application chinoise WeChat. L’initiative viserait à manipuler l’opinion publique dans les communautés sino-canadiennes, à travers des messages coordonnés qui s’attaquent directement à Mark Carney, ancien banquier central et figure montante de la vie politique canadienne.
D’après un rapport officiel publié il y a quelques jours, l’opération d’influence s’articule autour d’un compte anonyme particulièrement influent sur WeChat, baptisé Youli-Youmia. Ce compte, selon les renseignements canadiens, serait rattaché à une agence d’État chinoise spécialisée dans la sécurité intérieure, le renseignement et la censure. Son objectif serait de manipuler les électeurs sino-canadiens à travers une série de narratifs changeants autour de la figure de Mark Carney, qui brigue un siège de député à Nepean, dans la province de l’Ontario.
Les services de renseignement affirment que les publications ont d’abord valorisé Carney pour ses positions perçues comme pro-américaines, avant de virer à l’attaque frontale en remettant en cause ses compétences et son parcours. Ce basculement narratif, s’inscrirait dans une stratégie plus large d’influence électorale. Les élections fédérales canadiennes de 2025 se dérouleront le 28 avril 2025 : 343 députés doivent être élus.
Derrière cette opération, un réseau d’une trentaine de comptes secondaires aurait été mobilisé pour relayer les messages de Youli-Youmia et en maximiser la visibilité. Certains contenus ont atteint jusqu’à 3 millions de vues, un niveau d’engagement rare, même pour les organes de presse officiels chinois tels que le Quotidien du peuple. Cette stratégie algorithmique semble pensée pour contourner les mécanismes de modération habituels, exploitant une méconnaissance généralisée de l’écosystème WeChat au Canada. Il existe de nombreux outils web permettant de manipuler des réseaux sociaux tels que WeChat ou encore TikTok comme j’ai pu vous le montrer en vidéo dans la cyber émission de ZATAZ ou encore sur M6 et RTL, dans l’émission « Ca peut vous arriver ».
L’initiative n’est pas sans précédent. Le compte Youli-Youmia s’est déjà illustré par des attaques similaires contre d’autres figures politiques canadiennes. En juin 2023, le député conservateur Michael Chong en avait fait les frais, tout comme Chrystia Freeland, vice-première ministre, ciblée en janvier dernier. Ces campagnes, souvent relayées par des médias chinois proches du pouvoir, font planer le soupçon d’une implication directe de l’État chinois.
L’ombre de Pékin derrière l’écran
Du côté de la Chine, les accusations sont fermement rejetées. L’ambassade chinoise à Ottawa a dénoncé une « attaque injustifiée et absurde » fondée sur des « propos individuels publiés sur une plateforme sociale« . Dans un communiqué transmis au Global Times, un porte-parole de l’ambassade a affirmé que « la Chine s’oppose fermement à cette instrumentalisation politique » et n’acceptera jamais d’être « accusée sans preuve« .
Mais plusieurs éléments tendent à accréditer l’hypothèse d’une campagne organisée. Selon des médias indépendants chinois, certains employés d’entreprises publiques se verraient assigner la tâche de promouvoir activement des contenus politiques pro-gouvernementaux sur les réseaux sociaux, dans le cadre de leurs fonctions. Une pratique qui renforce l’idée d’un pilotage étatique indirect, masqué sous une apparente spontanéité.
L’affaire intervient alors que les tensions commerciales et diplomatiques entre les deux pays atteignent un nouveau pic. En janvier, la Chine a imposé des droits de douane sur plus de 2,6 milliards de dollars canadiens (environ 1,77 milliard d’euros) de produits agricoles et alimentaires en provenance du Canada. Une mesure de rétorsion après les restrictions imposées par Ottawa sur les importations de véhicules électriques, d’acier et d’aluminium chinois.
En octobre 2023, le gouvernement canadien a interdit l’usage de WeChat sur les appareils fournis à ses fonctionnaires, invoquant des préoccupations liées à la sécurité des données. Cette mesure faisait écho à l’interdiction similaire prise quelques mois plus tôt contre TikTok, autre application chinoise considérée comme potentiellement intrusive.
Ce n’est pas la première fois que le Canada accuse la Chine de tentatives d’ingérence. Déjà en 2021, des soupçons avaient émergé autour de campagnes de financement électoral opaque et de pressions sur des candidats. Mais la nouveauté du cas actuel réside dans son aspect numérique, dans sa technicité et dans le ciblage spécifique de groupes linguistiques minoritaires, souvent moins bien protégés par les systèmes traditionnels de surveillance de l’information.
Selon plusieurs analystes, la campagne vise non seulement à influencer les résultats dans certaines circonscriptions clés, mais aussi à tester les limites du système canadien.
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