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une traque sans précédent s’engage en Belgique

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Lu il y a 10 minutes


Une centaine de sites de streaming sportif illégal et plusieurs services IPTV ont été fermés en un week-end. Un signal fort envoyé par les ayants droit du sport télévisé ?

Aprés l’Espagne, la Grèce il y a quelques semaines, la Belgique a vécu une opération inédite de lutte contre le streaming illégal et l’IPTV clandestine en ce mois d’avril. Orchestrée dans le plus grand secret par le SPF Économie, à l’initiative du diffuseur sportif DAZN, cette offensive judiciaire marque un tournant décisif dans la guerre contre la piraterie audiovisuelle. En quelques heures, une centaine de sites de streaming sportif non autorisé et cinq plateformes IPTV ont été rendus inaccessibles à des milliers d’internautes. Et ce n’est que le début, promet DAZN, qui annonce une « première d’une longue série« .

Derrière cette action, un véritable bras de fer se joue entre les détenteurs de droits sportifs, les fournisseurs d’accès à internet et les réseaux de distribution parallèle qui prolifèrent dans l’ombre. ZATAZ vous expliquait au mois d’août 2025 que de nombreuses publicités pour regarder des matchs de football sur les réseaux sociaux étaient orchestrés par des casinos en ligne, des vendeurs de contrefaçons (montres, maillots sportifs, etc.), de boitiers IPTV et des pirates de chaînes à péages. Avec l’explosion du coût des abonnements télé et la multiplicité des plateformes de diffusion, le marché illégal de l’IPTV connaît une croissance sans précédent partout dans le monde. Pour les acteurs légaux du secteur, il devient urgent de reprendre le contrôle sur un contenu sportif de plus en plus convoité par les circuits illicites.

Exemple de site IPTV pirate repéré par ZATAZ.

Une opération éclair, un dispositif inédit

Samedi 5 avril à 19h15, les quatre principaux fournisseurs d’accès à internet belges — Proximus, Telenet, Digi et Orange/VOO — ainsi que trois gestionnaires de DNS alternatifs (Google, Cisco et Cloudflare) ont été simultanément alertés par le SPF Économie. En quelques minutes, les serveurs de redirection ont été reconfigurés pour bloquer l’accès à une centaine de sites ciblés par une ordonnance du tribunal de l’entreprise francophone de Bruxelles. On notera que les pirates n’ont pas peur de passer par des structures comme Cloudflare. Cloudflare permettant, en plus de profiter de connexion sécurisée, de cacher ses serveurs.

Il ne s’agissait pas d’un simple blocage statique. Pour la première fois, les autorités ont activé un mécanisme dit « dynamique« , capable de répliquer l’interdiction à tous les sites miroirs ou clones numériques qui pourraient surgir pour remplacer les URLs condamnées. Une technique de cyberdéfense proactive que les ayants droit espéraient depuis longtemps, et à laquelle les fournisseurs d’accès se sont montrés « particulièrement réceptifs« , selon l’administration fédérale.

« Une ambition de long terme« , affirme DAZN

À l’origine de l’initiative, DAZN ne cache pas sa satisfaction. Diffuseur officiel de la Pro League belge, la plateforme britannique a multiplié ces derniers mois les actions contre la diffusion non autorisée de ses contenus. « Il s’agit de la première opération d’une longue série« , confirme Benoît Corremans, directeur du développement pour DAZN. « Nous avions identifié une première liste de sites, mais nous avons pour ambition de la faire évoluer en permanence pour bloquer à la source toutes les tentatives de contournement. » Aprés, il suffit de laisser brancher TikTok ou encore Snapchat pour voir apparaitre des sites IPTV illicites.

« Une opération d’une ampleur inédite vient de frapper le cœur du système de streaming sportif illégal en Belgique.« 

Si le bilan complet doit encore être établi par la cellule anti piratage du SPF Économie, le signal envoyé par cette action judiciaire est clair : les diffuseurs ne comptent plus tolérer les pertes engendrées par le piratage. Selon une étude européenne, plus de 17 millions d’Européens utilisent aujourd’hui des services IPTV illégaux, avec une concentration particulièrement forte dans le sud de la Belgique, où la fracture numérique et les coûts élevés des abonnements légaux alimentent ce marché parallèle.

Des consommateurs pas toujours conscients des risques

Le recours à l’IPTV illégale séduit par sa promesse : accès à des centaines de chaînes payantes, souvent pour une fraction du prix des abonnements traditionnels. Mais ce service a un coût bien réel pour les utilisateurs. D’un point de vue légal, l’utilisation de ces flux piratés constitue un délit civil. Si les ayants droit choisissent de poursuivre les consommateurs, les amendes peuvent varier de 500 à 100.000 euros. Bien loin de l’économie espérée par les adeptes de ces systèmes.

En réalité, peu d’usagers finissent devant un juge. Les actions se concentrent davantage sur les fournisseurs — les « dealers numériques » qui écoulent des boîtiers IPTV ou revendent des abonnements via des groupes WhatsApp ou Telegram. En février 2025, deux boutiques situées à Wavre et Charleroi ont été fermées par la police fédérale pour vente illégale de matériel IPTV, illustrant la priorité donnée à l’élimination des intermédiaires visibles.

Escroqueries et vol de données, des conséquences insoupçonnées

Au-delà du volet juridique, un autre danger guette les utilisateurs de services IPTV illégaux : les risques financiers et la sécurité des données personnelles. Les plateformes pirates, rarement soumises à une quelconque réglementation, peuvent facilement détourner les données bancaires saisies lors du paiement. Des cas de fraude à la carte de crédit, de phishing et d’abus d’identité sont régulièrement signalés. Les utilisateurs de Paypal, même si ces derniers passent par Whatsapp et payer un « inconnu » peuvent permettre l’accès à leur compte en cas d’action de la justice. Le compte… et l’argent sur le compte !

En s’abonnant à ces services, les utilisateurs ouvrent aussi la porte à des arnaques plus insidieuses. Le partage de données personnelles avec des opérateurs non identifiés peut entraîner des campagnes de spam, du vol d’identité, voire la prise en otage de fichiers personnels via des logiciels malveillants.

« En Belgique, plusieurs centaines de milliers de personnes utiliseraient des services IPTV illégaux, selon les estimations du secteur.« 

Le SPF Économie rappelle que cette pratique ne relève pas seulement du domaine privé : elle alimente un écosystème criminel plus large. Derrière les plateformes d’IPTV illégale se cachent souvent des réseaux transnationaux impliqués dans d’autres trafics, du blanchiment d’argent à la cybercriminalité organisée. En les finançant, les consommateurs deviennent sans le vouloir des rouages d’un système illégal bien plus vaste.

Face à une menace numérique sans frontières, la Belgique ne compte pas rester seule dans sa lutte. DAZN travaille déjà avec d’autres pays européens, dont la France, pour harmoniser les pratiques judiciaires et renforcer la coopération entre autorités et plateformes. L’idée : créer un front commun capable d’agir rapidement à l’échelle continentale. Une démarche soutenue par la Commission européenne, qui a récemment appelé à la mise en place de procédures accélérées pour retirer rapidement les contenus sportifs piratés en ligne.

Pour les diffuseurs, le sport en direct reste un des produits les plus convoités sur le marché audiovisuel. Toute perte d’audience représente un manque à gagner direct, tant pour les plateformes que pour les ligues sportives. La bataille contre le piratage n’est donc pas seulement une affaire de droits, mais aussi de survie économique.

Cette action pose aussi une question fondamentale : face à la montée des prix des abonnements sportifs, comment responsabiliser le consommateur sans le stigmatiser ? Le recours à l’IPTV illégale révèle une tension croissante entre accessibilité du sport et protection des droits. Si les ayants droit veulent espérer regagner la confiance du public, il leur faudra sans doute repenser leur modèle économique, en le rendant plus transparent, plus flexible, et surtout plus abordable. La répression seule ne pourra suffire à inverser la tendance.

Et vous, seriez-vous prêt à payer plus cher pour voir du sport légalement, ou le système doit-il évoluer pour ne pas pousser les fans vers les chemins illégaux ?



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